Aujourd’hui nous risquons bien de voir du monde. Nous sommes samedi et Yant Flat n’est pas très loin de St. George, à vol d’oiseau en tout cas. Pour ce qui est d’y accéder pour de vrai, c’est une longue piste très roulante où un ou deux passages de gué nous font ralentir.
Une voiture est déjà garée et un mini van d’une université voisine arrive, déversant une dizaine d’étudiants que nous voyons se diriger avec soulagement vers le côté opposé de là où nous allons.
L’air est limpide et froid. Stefano joue au moulin à vent pour se réchauffer. Nous partons d’un pas allègre et vif dans l’espoir de nous réchauffer, les manches tirées sur nos mains pour les protéger du froid.
Par endroit les arbres s’éclaircissent, permettant aux rayons du soleil de nous caresser les mollets.
Le sentier monte tout doucement et je sais que lorsque nous allons arriver au bord du rim une surprise se prépare.
Lorsqu’une belle couche de sable profond vient à recouvrir le sentier, nous accélérons encore.
Il n’y a qu’a regarder la quantité de traces de pas pour comprendre que Yant Flat est un endroit fréquenté.
D’où nous venons ; les étudiants sont partis vers la montagne, direction nord.
Après 28 minutes de marche et 2 km parcouru, nous arrivons au bord du rim.
Petit à petit se dévoile à nous notre terrain de jeu de la journée : une vaste étendue de slick rock, au relief arrondi et dont la surface est majoritairement constituée de ce que nous appelons des écailles de tortue interrompues par des longues stries.
Nous prenons très vite conscience de la difficulté de la tache qui nous attend : le ciel est trop bleu, la lumière trop vive et les ombres déjà trop marquées.
Bon, nous allons essayer de faire de notre mieux mais nous ne promettons rien.
Nous commençons par aller voir une bosse de dromadaire… Ah, et j’avais oublié de mentionner la hauteur du soleil, nous interdisant toute photo avec le soleil dans le dos.
Du dromadaire nous passons au chameau.
Puis aux écailles de tortue.
Nous descendons vers une zone où les stries sont de couleurs différentes.
L’endroit est tout simplement magique. Magique de par les couleurs, les formes, la végétation qui arrive à pousser dans sur une surface improbable.
On pourrait aisément se croire sur la carapace d’un monstre assoupi. Pour une mouche, la peau d’un rhinocéros doit ressembler à ce que nous voyons.
Sauf qu’une carapace de rhinocéros est plutôt d’un gris uniforme.
Les creux se sont remplis de sable, où quelques plantes arrivent à pousser. Avec le temps, ces petits « oasis » accumulent de la matière organique et la végétation s’enrichit.
Nous remontons vers l’endroit où nous sommes arrivés. Au loin, sur le rim, nous apercevons un randonneur solitaire. Le masque blanc protégeant son visage nous fait dire qu’il est asiatique. Nous échangeons quelques mots et nous disons à tout à l’heure. Certes l’espace est vaste mais il y a de fortes chances que nous nous rencontrions à nouveau.
Yant Flat est constitué de plusieurs zones définies par le relief. Il faut imaginer chaque zone comme un plateau (plus ou moins plat). La longueur de chaque plateau est globalement la même commençant par le rim et se terminant par une falaise abrupte. Par contre, la largeur varie et chaque plateau est séparé de l’autre par un canyon.
Justement, GPS en main, Stefano nous dirige vers un canyon, canyon qui va nous permettre de changer de zone. Le sentier est approximatif et le passage de quelques blocs de rocher requiert un peu de crapahute.
Nous arrivons dans un espace plus étroit que le précédent, mais plus colorée. Des stries jaunes viennent s’ajouter au rose et à l’orange.
Un petit dôme strié de jaune, tâché de rouille trône en hauteur : c’est The Turtle.
C’est juste beau.
Comme nous n’aimons pas repasser sur nos pas, nous décidons de monter vers la crête que l’on voit ci-dessus. C’est beaucoup plus raide que ça n’en à l’air mais Stefano zigzague pour trouver des passages accessibles. Nous devons nous aider de nos mains mais les rochers sont bien stables. Notre choix est conforté lorsque nous entendons un lointain hello et repérons notre randonneur de tout à l’heure, perché au sommet.
L’air frais du matin a disparu et lorsque nous arrivons en haut nous sommes en nage.
Notre hiker solitaire a suivi notre montée. Il a en main un appareil photo sur lequel est monté un objectif de belle taille. C’est vrai que de là-haut nous avons une belle vue du dôme The Turtle. Nous apprenons qu’il est photographe de profession, qu’il a fait ses études à Boston et qu’il enseigne la photo a des groupes qu’il emmène en excursion. Il se présente : Bénédict Heekwan Yank. D’origine coréenne, catholique, il est tout content de nous dire qu’un de ses jeunes frères s’appelle également Stefano. Il nous laisse ses coordonnées et nous faisons un autoportrait. Je vous laisse aller découvrir sa page Pixels et son compte Instagram.
Voici The Turtle vu de la crête.
Initialement, nous pensions que la crête constituait le rim et que, de là, nous pourrions retourner à la voiture. Pas si simple. La crête est bien une crête. Le rim est bien en vue, mais il n’est pas tout à fait à proximité. Une descente bien raide nous attend. Mais bien que très pentu, le terrain reste très praticable.
Nous voici bientôt dans le creux, lui aussi recouvert d’une belle couche de sable dur et écailleux.
Après une barre Clif, nous attaquons la dernière montée du jour pour rejoindre le rim. Le terrain devenant sablonneux nous oblige à faire des petite pas en canard. Chaque centimètre se gagne durement.
Une fois en haut, il nous faut rejoindre le sentier. Devant nous, des buissons plus ou moins hostiles, quelques fois suffisamment espacés pour laisser une langue de sable, d’autre fois trop serrés, nous empêchant de passer. S’ensuit une errance dans ce labyrinthe qui nous rappelle ces jeux publiés dans certains journaux. Par trois fois nous devons faire demi-tour pour essayer une autre variante. Deux lapins détalent. Sur les langues de sable, les empreintes de faune pullulent. Nous sommes étonnés par cette abondance de faune dans cet environnement hostile. Nous n’avons pas encore vu une moindre gouille contenant de l’eau.
Ayant rejoint le sentier, nous croisons une bonne dizaine de familles ou de couples en route pour Yant Flat. Hum, nous avions bien fait de venir tôt.
Au parking, Stefano m’annonce que la journée n’est pas finie… Chic !
A suivre…
Flore du jour
Une warrior.
Jugez plutôt !
Autoportrait du jour
Pris par Benedict avec notre appareil. Thanks, guy!
Pris par Benedict avec son téléphone.