Notre randonnée du jour, nous amène à Swiftcurrent Lookout, une tour de guet pour repérer les départs de feu.
Comme hier, le réveil sonne à 5h30. Hier, nous sommes allés au dodo vers 9h (heu, p’être bien un peu avant pour moi, je dois avouer que je me suis endormie sur mon Kindle, pourtant sur un bon bouquin…).
Il est 7h40 lorsque nous nous garons sur le parking du sentier The Loop. Pas trop mal… Je crois bien, que, comme les fromages ou le vin, nous nous bonifions avec le temps. D’autant que de la cabine au Loop, il y a quand même quelques 20 km de route à parcourir.
6 km de montée jusqu’au chalet. Nous savons exactement à quoi nous attendre car hier, nous avons fait le chemin en sens inverse. 6 km de montée donc, pour un peu moins de 700 mètres de dénivelé positif. Quand je pense qu’il me faut en général 3 heures de chauffe (3 c’est le chiffre avancé par Stefano lorsque j’ai parlé de 1), je me dis que, au chalet, je devrais être échauffée.
Le sentier commence par quelques mètres de descente, avant de traverser un petit pont de bois. Ensuite, la descente continue, ce qui n’est jamais très bon lorsque, in fine, il ne doit y avoir que de la montée : ça rallonge cette dernière d’autant. Puis, enfin, la pente se dessine.
Le sentier contourne la montagne et monte doucement.
C’est incroyable le changement de perception par rapport à hier. Cette descente nous a semblé interminable et raide. Aujourd’hui, la pente nous semble douce.
Pas de huffing and puffing. Juste du bonheur avec un grand B.
L’air est frais (nous sommes partis avec nos vestes) et comme je répète encore à Stefano : qu’il est bon de faire un effort en plein air sans commencer à suer dès la trentième seconde !
Nous nous faisons dépasser par trois jeunes, aux mollets vigoureux et galbés. Ils n’ont pas l’air de faire partie de cette catégorie de hikers qui filent à donf pour quelques dizaines de minutes et s’arrêtent ensuite histoire de récupérer et de ne pas mourir.
Nous reviens alors en tête ce couple, qui nous a dépassé lors de la remonté de Bright Angel, elle devant, lui derrière. Lorsqu’ils sont passés, nous étions arrêtés, en train de savourer l’instant présent et faire sécher nos pieds. Il nous a demandé Are you broken? Que dalle lui avons-nous répondu… Nous les avons retrouvés un peu plus loin, lui au bord de l’asphyxie… puis encore plus loin, dans le bus, encore rouge écarlate, respirant à grand peine.
Nous montons dans la forêt d’arbres carbonisés. L’incendie date de 2003, et déjà une première couche épaisse de végétation recouvre le sol. Des feuillus, principalement.
Les troncs sont blancs-gris, sans écorce et, à part quelques souches noir-charbon, rien ne laisse supposer un incendie. Après observation, nous comprenons que l’écorce carbonisée s’est détachée des troncs durant les douze dernières années, laissant les troncs nus. Quelques endroits nous rappellent le Mount St. Helens, là où les arbres ne s’étaient pas fait arracher par le souffle de l’explosion du volcan mais simplement fait incinérer sur place.
Une heure après avoir quitté la voiture, nous sommes suffisamment réchauffés pour enlever une couche. Nous profitons d’une pierre plate et horizontale pour faire un autoportrait, car nous, nous aimons bien les autoportraits… ;-)
En face, côté…, le Sud-Ouest, Heavens Peak, dégagé et au bout, tout à droite, un lookout, construit en 1943. Abandonné durant plusieurs années, il y été récemment restauré et est listé sur le National Historic Lookout Register.
L’air est chargé de fumée mais des bouts de ciel bleu nous rendent optimistes.
Et c’est là, que tout à coup, nous nous trouvons presque nez à nez avec Cosette, la bichette. Vraiment pas farouche, la Cosette. Elle nous observe, la tête penchée sur le côté, les oreilles un peu n’importe comment.
Elle se laisse complaisamment prendre en photo, avançant même vers nous. Nous restons là, peut-être 5 minutes puis décidons de poursuivre notre chemin. Elle se retourne et nous précède sur quelques dizaines de mètres avant de s’éloigner du chemin, le tout dans un calme olympien. Nous constatons que ces côtes sont saillantes et espérons qu’elle aura le temps de faire des réserves pour l’hiver qui arrive.
Troncs dépouillés sur fond de ciel bleu.
Depuis quelques minutes, j’observe attentivement les alentours. Hier, plus ou moins dans le secteur, j’ai aperçu des campanules. Oh, rien de spécial, mais ici elles sont relativement rares ici. J’en ai remarqué une ou deux hier, sur le Highline Trail, peu de temps après avoir quitté la voiture.
Stefano me dit : peut-être les avons-nous passées. Sans doute, je lui réponds. Quelques deux mètres plus loin, elles sont là. Bon, reste à la prendre en photo, ce qui n’est pas aisé. Ces fleurs qui regardent le sol, quelle attitude détestable ! Vous me direz ce que vous en pensez après avoir regardé la partie Flore du jour.
Stefano en profite pour faire une photo de Fireweed, ces plantes qui sont les premières fleurs à repousser après un incendie.
Et à quelques mètres, des chardons. C’est la première fois que nous en voyons ici, à Glacier National Park. Enfin que nous en voyons en fleur, car les chardons secs et duveteux sont légion. C’est une fleur du coin, c’est certain.
Nous sommes sortis de la forêt calcinée et marchons maintenant dans une forêt bien vivante.
De loin, nous apercevons le chalet qui nous surplombe.
Ciel ! Nous n’avons pas vu le temps passer et surtout nous n’avons pas senti les 700 mètres de dénivelé que nous venons d’avaler.
Une autre bichette, Lisette, vient également nous dire bonjour. Les biches utilisent les sentiers pour se déplacer car depuis The Loop, le sol était marqué de multiples traces de sabot, sabots d’ailleurs qui ont la forme de cœur.
Les dernières mètres sont les plus raides.
Arrivés au chalet, nous nous installons sur une table, à proximité d’une corde pour pendre le linge. L’occasion faisant le larron, nous en profitons pour faire sécher nos tee-shirts. Le mérinos, c’est cool, mais ce n’est de loin pas le champion de la vitesse de séchage. Stefano a lu un comparatif et me confirme qu’il arrive en bon dernier.
Pendant que nous attendons que le vent veuille bien sécher nos tee-shirts, nous partageons notre temps entre une Clif Bar (c’est la seconde de la journée mais aujourd’hui, nous avons du rab) et la photographie.
D’abord, il y a ces espèces de perdrix, les ptarmigans, appelés lagopèdes alpins en français. Nous en avons également rencontré hier.
Ensuite, il y a Tic et Tac, les petits écureuils rayés. Ils se rapprochent lentement de nous, jouant la carte de la diversion. Nous tombons dans le panneau, les admirons et les photographions en leur lançant des compliments quant à leur petit museau si chou. Ce, jusqu’à ce que l’un d’entre eux saute sur le sac à dos de Stefano pourtant posé sur un banc et qu’un autre (ou peut être le même) s’accroche à ses mollets.
Du coup, nous sommes beaucoup, mais beaucoup moins copains et les surveillons de près tandis que nous envoyons notre message SPOT du jour (bon en fait, il risque bien de ne pas être le seul).
Le bâtiment technique, dont une partie est occupée par un ranger.
The Garden Wall. On distingue le sentier qui mène au Glacier Overlook.
De mouillés nos tee-shirts passent à humides et nous décidons de repartir.
Granite Park Chalet et notre table et corde à linge.
Notre prochain objectif est le Swiftcurrent Lookout.
C’est ce petit téton que nous apercevons là-haut, tout là-haut, sur le mamelon au centre de la photo. Hum, maintenant que je suis échauffée, rien ne me fait peur, même pas ça.
Il y a quelques jours, ce sentier était fermé par des ours avaient été repérés. Il a ré-ouvert hier, nous sommes allés le vérifier au visitor center.
La première partie de sentier se fait en terrain dégagé.
Le ciel s’est assombri, cette fois à cause des nuages. Le vent s’est levé.
Nous traversons une mini-forêt composée de mini-sapins. Aussi mini que soient la forêt ou les sapins, un ours peut facilement s’y cacher.
J’avouerai plus tard à Stefano que j’ai eu un petit moment où je ne me suis pas sentie vraiment à l’aise. Mais cette sensation désagréable est vite passée, à vrai dire, sitôt que nous nous sommes retrouvés en terrain découvert.
Plutôt que de continuer jusqu’au Swiftcurrent Pass, nous attaquons directement la montée jusqu’au lookout.
Le sentier zigzague gentiment sur la pente.
Nous croisons le hiker que Stefano avait repéré depuis longtemps quittant le lookout. Il nous informe qu’un vent violent souffle, qui a failli le renverser. Cool… Un hiker averti en vaut deux, et là, en l’occurrence, deux hikers avertis en font quatre. Le chiffre idéal qui réduit drastiquement les chances d’attaque d’un ours (sont pas fous les ours, quand même, faut pas croire !)
Le sentier passe au milieu d’une feu-forêt. Ici, les arbres sont petits et particulièrement tarabiscotés.
Des petits écureuils (Columbian ground squirrels) pas farouches du tout nous regardent passer avec intérêt.
Lui, il y encore la bouche pleine. Ça doit être un copain à Séraphin (ne cherchez pas, private joke!)
La pente des derniers switchbacks s’accentue et une fois sur deux, le vent est contre nous. Notre allure se ralentit (allez comprendre pourquoi !). Mais bon, chaque switchback nous rapproche de la cabane.
Tout à coup, le soleil apparaît. Wow, quel cadeau !
Nous pouvons ainsi contempler le Swiftcurrent Glacier. Ça, c’est avec le soleil… Alors vous imaginez sans !
Nous reprenons notre montée, sous le soleil.
Nous y voilà.
De là, la vue est à 360 degrés. Dommage qu’elle soit réduite à une peau de chagrin, la faute à la fumée.
La cabane est fermée mais nous guignons à l’intérieur : un lit fait, avec un sac de couchage, des vestes accrochées à un portemanteau, une kitchenette, des céréales et de la soupe en sachet. De quoi tenir quelques jours, pour sûr. Cette cabane, ou lookout était utilisée pour le repérage des incendies. Sa fonction est la même que celui que nous avions visité, au Mount Washburn.
Le vent ne nous permet pas de rester plus que quelques minutes.
Le temps de prendre quelques photos brumeuses…
… et d’envoyer notre message SPOT et nous voilà sur le chemin de la descente.
Descente toute pareille que la montée, avec des bouts face au vent et des bouts où le vent nous pousse. Mais en descente, c’est moins grave.
The Granite Park Chalet est visible, tout en bas.
Re-arbres torturés.
20 minutes après avoir quitté la cabane, nous sommes en bas.
Nous rejoignons le sentier qui mène à Switcurrent Pass et repartons vers le chalet, via la forêt sombre où décidément, un ours ou deux pourraient bien se cacher.
Non ça ne rigole pas !
Mais point d’ours aujourd’hui, ni les autres jours nous espérons. Nos bear deterrents restent sagement accrochés à la ceinture de nos sacs. Nous avons vérifié : nous pouvons dégainer très rapidement, avec une main.
Au chalet, nous retrouvons notre table et notre corde à linge et faisons comme chez nous. Car quand il y a de la gêne, il n’y a pas de plaisir, n’est-ce-pas ? Il y a plus de monde que ce matin et certains hikers vont passer la nuit ici.
Initialement, le plan A de Stefano était de rentrer à la voiture par là-même où nous étions venus.
Mais l’amour des boucles (même si, ici, en l’occurrence, nous fermerons la boucle via une navette) et surtout la non-envie de se taper 6 km de descente nous font choisir de rejoindre le Logan Pass via le Highline Trail. En plus, l’idée de refaire ce sentier, mais en sens inverse, nous enchante.
Il est 14h lorsque nous entamons le retour. Quelques 12 km à parcourir en 3h30 a prédit Stefano. Arrivée prévue à Logan Pass : 17h30. Pas plus tard, car nous ne sommes pas certains qu’il y ait des navettes après. Nous verrons. Au pire, nous ferons du stop.
En ce samedi, le Highline Trail est pas mal fréquenté. Comme le sentier est relativement plat, la priorité aux randonneurs qui montent ne peut pas s’appliquer. Nous prenons donc le parti de nous mettre systématiquement sur le côté pour laisser passer.
Nous délaissons la montée au Glacier Overlook. Et ce pour plusieurs très bonnes raisons : la visibilité doit être encore moins bonne qu’hier, nous n’avons pas le temps et accessoirement ( !) nous n’avons pas envie de nous taper cette montée dont certains endroits sont presque à la verticale (bon j’exagère un peu, mais si peu).
En général, nous échangeons quelques mots avec les randonneurs que nous croisons. La discussion avec un couple est mémorable. Lorsqu’elle nous voit arriver, la femme s’exclame : oh, mais vous avez des poids aux pieds ! What! Mais non, ce sont des gaiters, pour empêcher que la poussière ou autre ne rentre dans nos chaussures. Ensuite, elle se pâme devant le snack bag de Stefano, qui n’est autre que son étui d’appareil photo, accroché sur la poitrine. En repartant, d’une seule voix, nous concluons qu’elle était un peu à l’ouest. Peut-être l’altitude ? ;-)
Nous marchons d’un bon pas. Nous nous rappelions d’un sentier relativement plat. Nous avions complètement oublié une montée conséquente et sans fin (la montée sans fin) qui nous ralentit pendant de longues minutes.
Le vent forcit et le ciel s’assombrit encore.
Quelques gouttes de pluie nous obligent à enfiler Gore-Tex, chapeau de tschumpel (pour moi), puis mettre nos appareils photo à l’abri dans les sacs. Demain, nous prendrons nos ponchos. C’est beaucoup plus simple : pas besoin de couvrir les sacs à dos ou de rentrer les appareils photo.
Les gouttes de pluie se transforment pour quelques minutes en vraie pluie.
Haystack pass. Hier, il y faisait grand beau.
Puis nous sommes de nouveau au sec pour passer ce passage étroit, où des câbles sont à disposition pour s’accrocher.
Depuis quelques minutes, Stefano a accéléré le pas. La dernière montée (oui, encore une) se fait presque au pas de course. Nous arrivons sur le parking du Logan Pass a 17h28. Une navette attend. Nous la rejoignons rapidement. Le chauffeur nous confirme que nous ne sommes pas en retard et que les navettes circulent jusqu’à 19h. Ouf, plus de peur que de mal.
La navette démarre à 17h30 précises. Nous sommes seuls et discutons avec le chauffeur. Il connaît la route comme sa poche et négocie chaque virage avec agilité, voiture en face ou pas.
Nous arrivons à The Loop et retrouvons les trois jeunes hikers qui nous ont dépassé ce matin, en train de fumer (oui oui, de fumer) et de boire des bières. Ils ont fait un sommet dont le sentier n’est pas un sentier recensé par le parc, mais dont le point de départ se situe au Glacier Overlook.
Initialement, nous devions changer de cantine, ce qui impliquait prendre la voiture. Mais une fois à la maison, l’appel du plus pratique prend le dessus et c’est à pied, bras dessus-dessous, que nous rejoignons le restaurant pour une Kokanee bien méritée. Ce soir, ce sera tacos pour moi et fajita pour Stefano. Un peu d’hydrates de carbone n’ont jamais tué personne !
Je fais des efforts surhumains pour attendre 9heures avant de fermer les yeux !
Faune du jour
Cosette, et ses côtes apparentes.
Tac, ou Tic, allez savoir !
Un Columbian ground squirrel. Il se tient debout comme un chien de prairie.
Son pote ou son cousin, à nouveau, allez savoir !
Flore du jour
La fameuse campanule…
Ce chardon est en fait une espèce invasive, classée Noxious weeds. Moi qui étais si contente d’en avoir trouvé un en fleur !
Autoportraits du jour
En montant vers Granite Park Chalet. Il est 8h48 du matin, nous venons d’enlever une couche et la vie est belle !
Après être descendus de Swiftcurrent, et avant d’attaquer le retour, via le Highline Trail.