Belle randonnée dépaysante de 22 km au départ du visitor center de Skaftafell. L’objectif de la balade est d’aller voir un petit lac où flottent des icebergs, détachés du glacier Morsájökull. La marche d’approche n’est pas exceptionnelle, à part le passage par la chute d’eau de Svartiffoss, magnifique dans son écrin de colonnes basaltiques. Le retour par la rive de la rivière Morsá est lui aussi un peu monotone.
Contenue dans la pochette Allibert Trekking remise à notre arrivée à Reykjavík, une feuille de papier A4 plastifiée décrit succinctement 5 randonnées à effectuer dans le secteur de Skaftafell. Temps de marche et kilomètres sont indiqués, de même que le dénivelé. Nous avons laissé à Luana le choix de la balade du jour et la grande gagnante est celle qui va nous mener à un petit lac au pied du Morsàjökull, duquel part la rivière Morsà. Tout un programme. Nous nous réjouissons particulièrement de cette journée pour deux raisons : d’abord, il fait beau (enfin, il ne pleut pas !) – si si, c’est vrai – et ensuite nous ne roulerons que pour nous rendre au départ du sentier depuis Hof et retour. Une journée passée au grand air et en famille. Du bonheur en perspective.
La randonnée est décrite ainsi : Balade 3 : Morsàjökull – env. 6-7h de marche – 250m de dénivelé.
Quittez le camping de Skaftafell, direction la chute de Svartifoss, bien indiquée. Depuis Svartifoss poursuivez vote chemin vers la gauche en direction de Sjónasker. Vous pouvez passer à la table d’orientation mais il vous faudra revenir légèrement sur vos pas pour poursuivre vers la vallée. En arrivant en fond de vallée glaciaire, laissez en face de vous la passerelle qui enjambe la rivière Morsá. Longez le versant sur la droite jusqu’à arriver au pied de la langue glaciaire de Morsárjökull. C’est le point final de cette balade avec une belle vue sur le glacier et son lac où fondent tranquillement quelques petits icebergs. Retour par le même chemin. Si vous souhaitez éviter de remonter sur Skaftafellsheidi, empruntez le pont pour longer la rivière pendant environ 2,5km. Vous retrouverez alors un pont pour revenir vers le camping, traverser ce dernier et retrouver le parking.
Luana, au départ… Il est vrai qu’il est un peu tôt… En plus, va falloir monter !
Nous laissons le visitor center sur notre droite pour suivre le Svartifoss trail. Au commencement, le sentier est large, recouvert de gravier contenu dans des alvéoles de plastique. Les responsables de l’aménagement n’ont pas lésiné sur les moyens. La première étape du parcours semble être la grimpée d’une petite montagne boisée.
La montée se durcit assez rapidement. Le sentier reste égal à lui-même, large et bien revêtu. Nous dépassons et croisons plusieurs groupes de randonneurs. La chute d’eau de Svartifoss est une destination très prisée car facilement accessible.
Cette chute-là s’appelle Hundafoss. C’est un bonus.
Nous sommes arrivés au sommet de la colline et nous sortons de la forêt. Voici le genre de marquage que nous suivons.
Près du sentier, une pièce agricole abandonnée dans un champ, un vieux soc (?) tiré par un animal de trait, boeuf ou cheval. Ou peut-être ai-je tort d’utiliser le passé. Qui sait ?
Svartifoss
Et puis, au détour du chemin, nous apercevons Svartifoss.
Pour s’approcher, il nous faut quitter le sentier principal pour une sente étroite qui descend abruptement vers le torrent.
Si cette chute d’eau est une attraction très populaire, ce n’est certes pas à cause de sa taille, tout à fait raisonnable, d’à peine 20 mètres de haut. Ce n’est non plus pas à cause de son débit, qui est très loin derrière celui de Gullfoss. Non, ici, la différence, c’est le cirque de colonnes basaltiques et multicolores dans lequel elle se précipite gracieusement. Svartur, en islandais, signifie noir. Svartifoss signifie donc « chute d’eau noire ».
Si les colonnes balsamiques sont relativement claires à gauche, oscillant entre le blanc et le gris foncé, à droite, elles sont effectivement d’un beau noir jais.
L’eau provient de la fonte du glacier Svínafellsjökull, une autre langue du glacier Vatnajökull. Ces colonnes sont constituées de basalte, une roche magmatique volcanique issue d’un magma qui se refroidi rapidement. Se forment alors ces colonnes, hexagonales le plus souvent, sont le diamètre varie en fonction de la vitesse de refroidissement. Plus il est lent, plus larges sont les colonnes.
Les architectes de l’église Hallgrímskirkja de Reykjavík se sont inspirés de ces structures géologiques.
Autoportraits du lieu
Trois randonneurs suisses heureux.
Sjónasker
Revenus sur le sentier principal, les champs ont fait place à une forêt de petits buissons, à peine peu plus hauts que trois pommes.
Nous arrivons à une table d’orientation d’où nous avons une vue à 360 degrés sur des montagnes et des glaciers, l’immense plaine alluviale de la rivière Morsá, avec, au loin, la mer. Un paysage d’une diversité extraordinaire.
Voici la partie montagnes et glaciers, décrite précédemment.
Nous sommes à 290 mètres au-dessus du niveau de la mer et au point culminant de la randonnée. Les 250 mètres de dénivelé annoncés n’étaient donc pas un mensonge.
Nous traversons un plateau marécageux.
Psst ! Le chapeau de Stefano… Nécessaire car malgré le beau temps annoncé, les nuages laissent s’échapper quelques gouttes de pluie.
Le sentier a été aménagé avec des planches de bois, afin de protéger le sol. Ce qui nous rappelle que nous sommes dans un parc national.
Au grand dam de Luana, nous profitons de l’offre locale. Luana n’est pas très attirée par les baies et autres cadeaux de la nature qui peuvent se ramasser sur les bords de chemins et être dégustés tels que. Myrtilles, airelles des marais, camarines noires qui, à défaut d’être très gouteuses, se ramassent à la pelle et sont gorgées d’eau, nous font des clins d’œil appuyés et irrésistibles.
Au loin, une silhouette s’agite. En nous rapprochant, nous constatons que c’est une ranger, sécateur à la main, en train de couper des branches de petits buissons afin que le sentier ne se fasse pas engloutir. Elle commence à nous parler en islandais mais, devant nos airs ahuris, continue en anglais. Elle nous suggère de revenir en longeant la rivière, afin de varier et surtout d’éviter la remontée ici.
Passé ce grand marécage, la forêt a repris ses droits.
Le sous-bois est tapissé d’herbe haute et de prêles.
Arrivés au bord du plateau, nous commençons la descente vers l’immense plaine alluviale de la rivière Morsá. Au loin, une langue glacière. Elle s’avance beaucoup plus que celle que nous allons voir.
Le sentier s’étire maintenant sur le flanc de la montagne. Il y a un ou deux passages un peu étroits et aériens que Luana n’apprécie guère. Mais, après une grande inspiration, un pas, puis deux, puis trois et la difficulté est négociée avec succès.
Le pont, que nous traverserons au retour, pour tenter un semblant de boucle.
Morsádalur
Enfin, nous sommes en bas, au kilomètre 6 et des poussières.
Ne voyant ni lac, ni glacier, nous pensons naïvement qu’une petite heure de marche devrait nous y mener.
Le marquage : des piquets de bois au sommet peint de jaune.
Le sentier reste légèrement en retrait de la plaine. Ce n’est que par endroit que les arbres s’écartent et que nous pouvons jauger de notre progression.
Une chose est certaine : nous n’y sommes encore pas. Et de loin !
Mais l’humeur est au beau fixe. Nous restons de longs moments sans parler puis l’un d’entre nous dit quelque chose et la conversation rebondit. Depuis que nous avons croisé la ranger, nous n’avons vu personne. Avec le ciel bleu qui s’installe tout doucement, nous réalisons la chance d’être dans cet endroit privilégié.
Emptiness.
Nous tendons le cou, nous mettons sur la pointe des pieds pour tenter d’apercevoir ce fameux lac. Pas trop loin, à environ 500 mètres, un petit monticule. Je lance, un peu au hasard, afin de redonner de l’allant à tout le monde : je suis certaine que le lac est derrière. Il l’est, effectivement, mais il faut encore marcher un peu pour y arriver.
Morsálon
Luana est en train de s’auto-digérer (tels sont ces mots). Elle s’assoie sur une grosse pierre et nous congédie d’un revers de main : moi, je mange, vous, vous allez voir le lac.
Un panneau planté à mi-chemin donne quelques renseignements quant au Morsájökull. Nous apprenons ainsi que le Morsájökull est une « coulée » de glace qui s’échappe de la calotte glaciaire du Vatnajökull. A proximité d’une falaise, la coulée se brise et dégringole 350 mètres. Les morceaux de glace se rejoignent et reforment un glacier en bas de la paroi. En été, la glace tombe et se reforme tout en se mélangeant au sable porté par le vent. Elle prend ainsi une couleur sombre. En hiver, par contre, la glace se mélange à la neige pour prendre une teinte plus claire. C’est ainsi que, au fil des étés et des hivers, naissent ces bandes horizontales alternées que l’on voit au loin.
Couplée à ce phénomène, appelé « ogives glacières », la fonte de la glace est différenciée selon sa couleur, la glace la plus foncée fondant plus rapidement que celle plus claire. Ce qui provoque des « rides », ou des ondulations.
Les nuages s’obstinent à laisser dans l’ombre les pans de montagne.
Voici une photo au zoom numérique. Sa qualité n’est pas excellente mais elle permet d’observer les différents éléments composant le glacier. Au sommet de la falaise, la calotte glaciaire du Vatnajökull. Au bas, le Morsájökull et entre les deux, des cascades. Les ogives sont bien visibles. Plus bas, avant le lac, une zone sombre. En 2006-2007, une partie de la montagne s’est écroulée recouvrant de débris 720’000 m2 de glacier (ce qui représente quand même environ 95 terrains de foot). Epaisse de 2 à 6 mètres, cette couche opaque défend le glacier de la chaleur. En dépit de cette protection inopinée, les scientifiques prévoient sa disparition en 2040.
L’idée de me tremper me traverse 3 secondes l’esprit. Je renonce à cause de l’irrégularité de l’ensoleillement. Et puis, il est déjà 14h30. Nous sommes partis depuis plus de 4 heures. Le calcul est vite fait : arrivée prévue à la voiture sur le coup des 18h.
Nous retrouvons Luana, béate, le ventre plein. Elle partage généreusement les restes de son pique-nique avec nous.
Le retour
Repus, satisfaits, heureux d’avoir pu découvrir ce petit coin sauvage, nous reprenons le chemin. Le lac disparaît sitôt que nous descendons du petit monticule. Mais le glacier lui, reste dans notre champ de vision. Nous nous retournons tous plusieurs fois afin d’inscrire cette image au plus profond de notre mémoire.
Notre prochain objectif est d’atteindre le pont.
Le ciel est maintenant bien dégagé.
Des ronces de rochers… Je les déguste en douce car Luana m’a interdit de les consommer sans savoir si elles sont comestibles ou non. En premier lieu, je pensais à des mûres arctiques, mais la forme leurs fruits ne ressemblent pas à une mûre. Ils ne sont composés que de quelques drupes, disposées irrégulièrement. Leurs feuilles, en revanche, sont très similaires à celles de la ronce commune, où poussent les mures.
Juste avant d’arriver au pont, voici nos options.
Nous suivons les conseils de la ranger et optons pour le retour par la rivière. Nous traversons donc le pont.
Voici d’où nous venons. Le sentier est quelque part entre la base de la montagne et le bord de la rivière.
Le sable noir s’invite.
Derrière nous, après 50 minutes de marche environ, l’immense lit de la rivière Morsá.
Devant nous, l’immense lit de la rivière Morsá. We are not out of the woods yet comme disent nos copains américains.
Et voici le second pont. Le visitor center se rapproche. Ce qui n’est pas pour nous déplaire, la marche sur le sable et les cailloux étant un peu monotone.
Je consulte la feuille plastifiée qui décrit la randonnée. Une carte grossière occupe une moitié de la feuille. Même en l’absence de détails, je constate que nous sommes à un peu plus de la moitié du parcours seulement. Je souris intérieurement mais ne dis rien. Il ne faudrait pas décourager l’équipe !
La rivière Morsá, vue depuis le pont. Le débit est impressionnant.
Trois digues successives protègent la route et le visitor center de la furie de la rivière. Elles ne font que quelques mètres de haut mais les gravir nous demande un gros effort. Nous en avons plein les pattes.
Les maisons que nous apercevons au loin semblent reculer à chaque passage. Mais tout arrive à qui sait marcher…
Encore un petit effort… et nous arrivons au camping.
Hof
Près de notre hôtel, le Adventure Hotel, une charmante petite église et son cimetière.
Ses locataires y coulent des jours heureux.
Autoportraits
Quelque part, sur le lit de la rivière Morsá.
Au bas du Morsájökull.
Sur le sommet du petit monticule qui domine le lac.
Quelque part sur le chemin du retour !
A l’arrivée au camping… Sourires pour certains, soulagement pour d’autres ! Mais bonne humeur pour nous trois !