Le titre de ce billet, Indian Henry’s Hunting Ground, c’est déjà tout un programme, non ?
Ce matin en nous levant, nous nous avouons que nos jambes sont un peu raides de la balade d’hier et que les quadriceps, fessiers et mollets se font un peu sentir. Mais nos yeux sont encore brillants de l’expérience magique vécue hier.
Nous discutons du programme du jour lors du petit déjeuner. Stefano me propose une balade facile. J’approuve.
Nous garons la voiture à sur le parking proche du pont qui enjambe la Kautz Creek, car le programme du jour est de suivre le Kautz Creek Trail.
Numero uno, lançons-nous en même temps; nous sommes les premiers.
Nous remarquons au passage des containers verts pour le recyclage. Génial !
Le ciel est bleu, bleu, bleu et la luminosité exceptionnelle.
La première partie du sentier longe la rivière. Le sentier est large, le sol recouvert d’aiguilles de pin.
La forêt est constituée principalement de pins et sapins.
Les troncs blancs sont des troncs d’arbres à feuilles caduques, les Red alder. Pendant longtemps ces arbres ont été considérés comme de la « mauvaise graine » et certaines fois exterminés des forêts de conifères à coups de pulvérisations aériennes.
Plus jamais je ne regarderais avec dédain une haie de thuyas, ces petits arbustes verts et sans grâce plantés pour empêcher que le voisin voit ce qu’il y a dans les assiettes de son voisin.
Ici, les thuyas – Western Red Cedar – sont des arbres majestueux, pouvant atteindre une cinquantaine de mètres de haut et vivre jusqu’à 1’000 ans.
Nous marchons ainsi près de 1,6km, respirant l’air chargé de diverses senteurs. À proximité des arbres morts, les odeurs sont plus intenses.
Arrive le moment où nous devons traverser la rivière. Lors des fortes crues de 2006, la rivière a changé de lit.
Nous traversons d’abord la partie délaissée, à sec.
Puis, la rivière… Et la bonne nouvelle c’est qu’il y a un pont.
Car la rivière peut certaines fois être « cranky as your spouse on tax day« .
La déclivité augmente et le sentier se rétrécit.
Il y a même des arbres chevelus.
Des fougères et autres plantes envahissent le sous-bois.
Nous sommes les premiers promeneurs de la journée et cette primauté à un prix : nous (enfin, Stefano pour être honnête car il marche devant) ramasse toutes les fils et toiles d’araignées qui ont poussé durant la nuit.
Celle-ci fut évitée.
Lorsque nous arrivons aux alentours de 1’500 mètres d’altitude, nous trouvons des plaques de neige. Bientôt, le sentier n’est plus visible.
Ce n’est pas très grave, car lui, le Mont Rainier, il est bien visible !
Cela dit, Stefano m’avouera plus tard ne pas être très à l’aise. Bien sûr nous avons le GPS mais si ce dernier tombe en rade, la carte ne peut pas vraiment nous aider. La neige efface tous les points de repère.
Nous sortons de la forêt et arrivons dans une sorte de combe, exposée plein sud.
Le vert tendre de la végétation témoigne de sa jeunesse. Sous nos pieds, la neige fond à vue d’œil.
Il y a de l’eau qui court partout.
Ouf, un peu de plat… Le GPS annonce déjà 1’000 mètres de dénivelé.
Derrière nous, le Mount Adams.
Devant, le Mount Rainier.
A cet endroit précis, nous faisons une mini pause Clif Bar. 2 à 3 minutes d’arrêt durant lesquels nous pivotons sur nous même, histoire d’admirer le paysage qui nous entoure.
Évidemment, nous faisons un autoportrait !
Nous repartons et bientôt le sentier reprend de la pente.
Nous arrivons sur un plateau. Nous sommes au bout de la montée.
Devant nous, majestueuse, The Mountain, comme on l’appelle ici.
Nous retrouvons le Wonderland Trail. Grace à un panneau, à peine visible dans la neige.
Nous arrivons en vue d’un refuge, appelé Indian Henry’s Patrol Cabin.
A proximité, un petit lac en train de réapparaître après plusieurs mois noyé (ce qui est paradoxal pour un lac) dans la neige.
A notre grande surprise, le refuge est ouvert. L’intérieur est bien aménagé : table, chaise, plan de cuisson, ustensiles de cuisine. Nous n’ouvrons pas les placards mais imaginons que nous y trouverions du café et quelques soupes en sachet.
Une échelle conduit à un galetas. Des vielles raquettes à neige ornent un mur.
Des cahiers sont posés sur la table. 2009, 2010, … 2012. J’ouvre le cahier qui se trouve en haut de la pile, à la dernière page remplie. Le dernier visiteur était là le 29 juin. Il raconte être arrivé par le Wonderland trail et y avoir croisé 4 backpackers au look de hobos (des sans domicile fixe).
Je tourne les pages. Certaines textes remplissent plusieurs pages ! Incroyables. J’écris quelques lignes et signe The Two Swiss Hikers.
Durant la montée Stefano avait émis l’idée de redescendre par le Wonderland Trail et de rejoindre Longmire. Mais nous ne nous attendions pas à trouver de telles quantités de neige. Stefano me dit : nous ne savons pas ce que nous allons trouver. Je préfère revenir sur nos pas.
Je suis un peu déçue mais en même temps, Stefano a raison. Et nous ne sommes mêmes pas certains d’être en mesure de retrouver nos traces dans la neige. C’est dire. Avec le soleil, la neige fond à une vitesse grand V et les traces de pas s’effacent.
Nous quittons Indian Henry’s Hunting Ground. Je me retourne pour un dernier regard. La cabin n’est presque plus visible.
Le retour est tout aussi magique que l’aller. Stefano avait raison. Par endroit, nous perdons nos traces qui ne datent pourtant que de quelques heures.
Comme le Mont Rainier ne monopolise plus toute notre attention (il est derrière nous), nous découvrons des paysages qui nous avaient échappés.
Par exemple, en face de nous, le Mont Adams (bon, lui nous nous avait pas échappé d’ailleurs).
Nous entamons la descente et retrouvons la forêt.
Au pied de chaque arbre, un cercle de terre fraîchement libéré de sa gangue neigeuse. On voit, on sent, on imagine que la vie y fourmille.
Les Avalanches Lillies se préparent…
La descente est interminable. Nous ne pouvons croire que la montée a été si longue. Nos petits petons sont soumis à rudes épreuves. Ce soir, il y aura certainement un peu de chirurgie pour crever des ampoules.
Nous voici proche de Kautz Creek.
Ne trouvez-vous pas que le terme « grand dérangement » s’applique parfaitement pour décrire cet enchevêtrement de troncs et de rocs ?
Après avoir traversé Kautz Creek, le petit bout de sentier tout plat qui nous avons semblé si court ce matin n’en finit pas.
Il ne fait pourtant pas plus de 2 km mais certaines fois, dans la vie, 2 km peuvent en sembler 20.
Mais, comme j’ai l’habitude de dire, tout est une question de temps. Et le temps nous l’avons !
Nous y sommes !
Je vous laisse deviner ce que nous choisissons de mettre dans nos assiettes au dîner (c’est facile… c’est le même menu qu’hier et avant hier, mais sans dessert).
Et comme prévu, avant le coucher, je me déguise en infirmière et lunettes sur le nez, je m’attelle à crever les 2 ampoules de Stefano avec une aiguille en y laissant un bout de fil (c’est mon Pôpa qui avait cette habitude), histoire qu’elles sèchent bien.
Je ne suis pas vraiment à mon avantage, hein ?
Flore du jour
Autoportraits du jour
Près de la cabin de Monsieur Harry.