L’exploration hors des sentiers battus de Petrified Forest National Park se poursuit avec une visite de First Forest, une vallée recouverte de troncs pétrifiés qui constituait la première halte pour les quelques touristes qui venaient visiter le parc à la fin du 19ème siècle.
Ce matin nous prenons notre temps. Deux cafés pour Stefano, quelques pages virtuelles d’un bon bouquin (nous utilisons des liseuses Kindle) et c’est après 9h que nous sommes prêts à commencer notre randonnée du jour.
Aujourd’hui, nous somme rentrés dans le parc par l’entrée sud et nous nous garons au parking du point de vue permettant d’admirer Jasper Forest. Il fait un peu moins froid qu’hier car le ciel est couvert.
Le point de vue surplombe une vallée sur laquelle sont éparpillés de nombreux troncs. Cette vallée est également appelée First Forest car c’est le premier endroit à avoir été exploité par l’industrie du tourisme ou l’industrie tout court au temps où le pillage des troncs était encore d’usage courant.
C’est pour cette raison d’ailleurs que dès 1906 la zone a été protégée par la mise en place d’un National Monument qui devint en 1962 un National Park.
Du parking part un sentier non maintenu qui mène à une ancienne route construite par les CCC et utilisée par les premiers visiteurs du parc.
Dès les premiers pas, des troncs pétrifiés nous accueillent.
Certains troncs font office de jardinières, investis par des touffes d’herbe. Peut-être même par des fleurs en été…
Et voici une autre jardinière. C’est joli, non ?
Les troncs de Jasper Forest sont très différents de ceux rencontrés hier. Ils sont pétrifiés et cristallisés et les cristaux affichent toutes les couleurs de l’arc en ciel.
Arc en ciel, ciel, soleil ? Mais où est donc le soleil aujourd’hui ? Grrr ! J’ai pourtant remis une petite fortune au faiseur de pluie pour qu’il parte en vacances cette semaine. J’aurai peut-être dû soudoyer également le faiseur de nuages…
Le ciel est obstinément gris. Seul ce petit morceau de tronc dont l’aspect est exactement celui du bois éclaire la scène. Au sol, ces pierres multicolores sont des morceaux de bois pétrifiés.
Nous sommes sur l’ancienne route construite par les CCC.
Chaque petit canyon (et il y a un petit canyon entre chaque dune) recèle un nombre important de tronc. Nous nous séparons et partons chacun de notre côté. C’est la meilleure solution pour éviter des « tâches » intempestives sur nos photos car nous travaillons avec des grands angles.
Nous sommes seuls. De temps en temps nous entendons passer une voiture, au loin sur la route. Sinon, le silence est absolu, troublé seulement par le bruit de nos pas. Même pas un cri d’oiseau ni de bourdonnement d’insecte.
Voilà notre horizon.
Le ciel semble s’éclaircir. Nous sommes toujours à proximité de l’ancienne route, que nous abandonnons régulièrement pour aller explorer un canyon. Les quelques 20 minutes qu’il nous aurait fallu pour rejoindre l’endroit où elle fait demi-tour se transforment en heures.
Nous arrivons là où la route fait une boucle avant de se terminer. Au centre de la boucle, une formation géologique trône : Eagle Nest Rock. Ou plutôt ce qu’il en reste. Le hoodoo qui surplombait la dune s’est effondré en 1941, suite à une période de pluies abondantes. Vous pouvez consulter des photos ici. Sur la photo suivante, au centre, Eagle Nest Rock et un reliquat d’un passage construit par les CCC pour laisser passer l’eau.
Globalement, la route a très bien résisté au temps. À part une courte section qui a été emportée par un wash lors, sans doute, de pluies importantes, le tracé est bien conservé de même que le revêtement gravillonnée.
Les trous de ciel bleu commencent à prendre le dessus. Une belle éclaircie s’annonce. À nous d’être patients.
Histoire de tuer le temps en attendant le soleil, nous partons en exploration, suivant un canyon après l’autre.
Nous trouvons une longue portion de tronc encore prisonnière de la roche. Sur la photo suivante, on le distingue, à mi-hauteur de la butte centrale.
Il est énorme.
Et il soutient indéniablement la roche qui le recouvre partiellement.
Non loin, un autre tronc, du même gabarit, a été libéré de la roche et a roulé en contrebas.
Difficile d’expliquer en quelques lignes le processus long de pétrification des troncs. Nous dirons que, pour beaucoup, qu’ils ne sont pas originaires de la région mais ont été transportés par les eaux, recouverts petit à petit par des sédiments et des cendres volcaniques. Au fil du temps, la matière organique a été remplacé par du silicate qui a cristallisé. Les couleurs proviennent de certains métaux, tels que le manganèse ou le fer, ou d’autres éléments chimiques tel que le carbone ou ou encore le chromium.
Les « forêts » que l’on rencontre ici à Petrified Forest National Park sont des entassements de troncs accumulés par l’eau lorsque celle-ci a été stoppée par un barrage naturel.
Les troncs sont prisonniers de la couche géologique dite de Chinle dont l’épaisseur dans le parc est d’environ 600 mètres.
Pas étonnant donc que nous trouvions des troncs même en hauteur.
Ultérieurement, un peu de lecture nous apprendra que les troncs rencontrés ici n’ont pas de cercles (lignes de vie) car le climat d’alors était tropical permettant une croissance tout au long de l’année.
Et que voyons nous ici ? Un tronc ? Oui… Mais quoi d’autre ? La moitié droite du ciel de couleur bleue !
Tadam ! Ah, ça change tout !
Ce dôme est un dôme typique dit de Chinle. Il est composé de sable, dont les states sont multicolores. Nous avons déjà eu l’occasion d’en admirer quelque uns, comme lors de notre monté à Starlight Arch ou encore lorsque nous sommes allés à Torrey par le Burr Trail.
Nous refaisons une partie du parcours effectué ce matin, alors que le ciel était couvert.
Les couleurs sont éclatantes.
Je suis très contente de ma photo. Ce petit bout d’arbre mesure à peine 15 cm de haut.
En plein travail… Pff, c’est pas facile les vacances…
Le résultat ? Le voilà.
Nous sommes revenus vers le parking (il est en haut, sur le rim) et commençons l’exploration sud de Jasper Forest.
Le sable devient franchement jaune…
avant de virer au blanc-rose-gris et violet.
Le sol devient aride et désertique.
Un beau tronc tout rond.
Stefano me montre cette plaine et me dis : si nous traversons cette plaine, de l’autre côté, il y a une autre « forêt », appelée First Forest. Ça te dit ? Je suis partante à 100%. J’adore me balader au milieu de nulle part.
Pour accéder à cette plaine, nous longeons une mesa. Là encore, des troncs sont posés sur les flancs érodés.
C’est parti !
Au milieu de la plaine passe une piste, visiblement utilisée par les rangers. Nous la suivons sur quelques centaines de mètres avant de bifurquer sur la droite.
Les troncs pétrifiés sont disséminés ça et là. La concentration est loin d’être celle d’une forêt.
Stefano regarde de plus en plus fréquemment le ciel. Il s’est assombrit et au loin nous voyons qu’il pleut.
Ce sera une des dernières photos. Si si, j’ai les yeux ouverts ! Je ne fais pas dodo.
Une grosse goutte de pluie… puis une autre, encore plus grosse. Nous enfilons nos ponchos dans l’urgence, le vent violent rend la tâche difficile voir impossible. Les pans des ponchos battent nos jambes. Nous sommes obligés de les tenir solidement et ils s’échappent à plusieurs reprises.
La visite de First Forest, ce sera pour une autre fois et nous revenons sur nos pas.
Stefano jure et peste en italien. Moi je commence à rire du comique de la situation. Nos ponchos sont maintenant enroulés autour de notre buste, inutiles. La prise qu’ils offrent au vent nous fait dévier de notre chemin. Une section du sentier long le rim. Heureusement que le vent souffle du bon côté, sinon nous serions déjà tombés au bas du rim. Le vent arrache le chapeau de Stefano. Je le vois piquer un sprint pour le rattraper. Je ris de plus belle. Heureusement, la voiture n’est pas loin.
Lorsque nous arrivons au parking, la pluie cesse mais le vent redouble. Nous nous engouffrons dans la voiture, ouvrant avec précaution les portières, puis nous restons là un moment, moi à calmer mon fou-rire et Stefano a retrouver sa sérénité alors que le vent secoue la voiture.
Nous arrivons au visitor center. La tempête s’est calmée aussi vite qu’elle est arrivée. Nous en profitons pour compléter nos connaissances sur le Trias, sa faune et sa végétation.
Autoportraits du jour
L’appareil photo est évidement posé sur un tronc pétrifié.