Annoncée médiocre, la météo nous a fait une belle surprise. C’est au soleil que nous montons au Faulhorn depuis Bussalp. Soleil certes, mais la neige est présente et l’atmosphère parfois glacée.
Nous avons tellement aimé Grindelwald, découvert début septembre lors d’une semaine de vacances en famille, que nous n’avions qu’une hâte : y retourner. Certes, il y avait dans ce souhait une opportunité bassement matérialiste : réutiliser et amortir notre Corona pass (ça ne s’invente pas), valable jusqu’à la fin du mois de novembre. Notre première expérience de location d’appartement à Uf em Stutz ayant été tout simplement géniale, nous n’avions aucune raison de chercher ailleurs. Et bien nous en a pris. Ce samedi après-midi, nous nous voyons remettre les clés d’un appartement neuf de plus de 100m2, avec 3 chambres, 2 salles de bains, salon et cuisine superbement équipée. Nous condamnons 2 chambres et une salle de bains. Faut quand même pas exagérer…
Ce dimanche matin à 8:35, nous attrapons le bus en sortant du chalet. L’idée est de monter à First et de rejoindre Bussalp en passant par le Faulhorn. Mais arrivés à Grindelwald, le bus qui monte à Bussalp est là. Du coup, Stefano change notre itinéraire et, opportunistes, nous nous y installons. Depuis notre dernier passage, il nous semble que la route est encore plus étroite. Le bus ralentit à plusieurs reprises pour négocier des virages particulièrement serrés. Nous arrivons à destination alors que l’odeur de diesel mélangée à celle du chauffage commence à perturber mes sens. Je suis contente de sortir au grand air.
Stefano, bon prince, me propose de démarrer la balade par la route, histoire que le vieux moteur diesel qui me sert de cardio se mette en route sans tousser. Mon instinct de survie étant plus fort que ma fierté, j’accepte sans rechigner.
Et pis, y’a pire comme route, non ?
La première longueur se fait en papotant allègrement. Notamment des conditions météo et du temps magnifique. Nous ne savons pas s’il durera, mais la surprise est de taille. Après le premier virage, la pente s’accentue sans prévenir. Allez savoir pourquoi mais notre conversation se tarit. D’autant que nous marchons d’un bon pas, afin de nous réchauffer. C’est qu’il ne fait pas chaud, à 1’800 mètres d’altitude.
Barrière naturelle à voitures. Les vaches, elles, n’en auraient cure, si elles n’étaient pas redescendues dans la vallée il y a quelques semaines.
Un des chalets, au-dessus de Bussalp. Nous sommes fans de la couleur du bois vieilli par les intempéries. Le cocker, en premier plan, appartient à deux randonneuses que nous venons à peine de dépasser.
A partir de là, les choses sérieuses vont commencer…
A savoir, la montée dans la pente et dans la neige.
Par moment, le brouillard s’invite, rendant l’atmosphère cotonneuse. Nous craignons toujours que le nuage s’accroche et ne parte plus. Mais cette fois encore, le vent a raison de lui.
Stefano s’arrête fréquemment. La sangle de son appareil photo l’oppresse. L’altitude y est également sans doute pour quelque chose. C’est que ça monte, par un sentier qui oublie de faire des zigzags pour adoucir la pente !
Les chalets de Bussalp ne sont plus que des petits points.
Et là, devant nous, le Faulhorn, notre objectif du jour. Enfin, le premier.
Des traces de raquettes marquent le sentier qui monte à Faulhorn. Même si par endroit, nous nous enfonçons jusqu’aux mollets, c’est plutôt à cause de la neige accumulée par le vent. La couche reste peu épaisse. Ce sont vraiment les premières neiges de l’hiver 2020-2021.
Au loin, le Bachsee. Le lac du Bachsee que nous retrouverons d’ici peu, sur le chemin de la descente.
Le vent, qui souffle en rafale, nous accompagne jusqu’au sommet.
Le drapeau de la commune de Grindelwald, a sans doute connu des jours meilleurs…
En short. Un peu juste lorsque la neige caresse les mollets.
Nous pénétrons dans le restaurant, désert, et commandons un chocolat chaud après avoir rempli une fiche Covid. Lorsque la serveuse nous propose de rajouter de la chantilly, nos visages s’illuminent : la réponse est sans équivoque.
Stefano va échanger quelques mots avec le propriétaire des lieux. Ce dernier confirme que le restaurant est aux mains de la même famille depuis 4 générations. Des chaussures sèchent au pied du poêle qui diffuse une douce chaleur.
Nous n’avions pas vraiment fait attention à la musique s’échappant des haut-parleurs jusqu’à ce que les premières notes de Bohemian Rapsody se fassent entendre. Derrière le bar, les serveuses chantonnent. Nous, un peu moins discrets, chantons franchement.
Nous nous préparons à repartir. Gants, bandeaux et doudounes sont de mise.
Au loin, le Schwarzhorn et le Wildgärst.
Et voilà l’ensemble du bâtiment.
Allez savoir pourquoi la descente est plus facile que la montée. Et ce n’est pas le sucre avec lequel nous avons arrosé généreusement nos chocolats chauds qui en est la cause. Néanmoins, tout bien considéré, peut-être est-ce le sucre, qui, transformé en alcool par l’alchimie du beau temps, du vent et du froid nous fait chanter à tue-tête le refrain de Bohemian Rapsody. Et comme nous ne connaissons (et de loin) pas toutes les paroles, nous les complétons avec des histoires de lapin, de foin, de marmottes qui passent leur temps à dormir. Ceux qui étaient venus ici pour le calme et la tranquillité vont être servis.
Le banc de la Reetihitta, orienté plein soleil, nous invite au pique-nique.
Nous mordons allègrement dans nos sandwichs, adossés au mur chaud, les visages tournés vers le soleil. Soleil qui disparaît brusquement masqué par un nuage. Nous écourtons la pause et reprenons la descente.
A l’approche du Bachsee, le soleil semble être définitivement parti.
Un coup d’œil derrière nous le confirme : les nuages envahissent les cimes et le Faulhorn est maintenant caché.
Sur les rives du lac, quelques randonneurs-touristes s’activent avec leur téléphone. Deux cyclistes, poussant péniblement leur vélo dans la neige, doivent regretter leur choix.
La petite maison rose éclairée d’un rayon de soleil.
Stefano propose de revenir sur Bussalp par le sentier que nous aurions dû emprunter si nous étions partis de First comme initialement prévu. Début septembre, j’avais regardé avec envie ce sentier, coupant le flanc de la montagne, pour se perdre on ne sait où. C’est une occasion rêvée.
La neige est lourde et mouillée. Piétinée par les pas des randonneurs qui nous ont précédés, elle fond, se mélange à la terre pour former une jolie pâte brunâtre, que nous appelons poutchichaka, un mot d’enfant de Stefano pour désigner la boue. Nous nous félicitons d’avoir imperméabilisé nos chaussures avant de partir, mais doutons néanmoins de conserver les pieds au sec.
Nous nous félicitons également de ne pas devoir faire la trace.
Le relief s’aplanit et le sentier longe deux petits plans d’eau. De fines plaques de glace flottent à la surface. D’ici quelques semaines, elle recouvrira le tout, puis la neige s’installera jusqu’au printemps. Si vie aquatique il y a, elle sera en pause forcée jusqu’au printemps.
Nous arrivons à une croisée de sentiers. L’un descend dans la vallée par un sentier qui, vu sur la carte du GPS, ressemble à s’y méprendre à un knee breaker : une succession de zigzags évoluant dans des courbes de niveau serrées comme les dents d’un peigne. L’autre remonte le long de la crête, passe près d’un refuge, pour arriver à Feld puis à Bussalp.
Le dernier bus est à 17h40 annonce Stefano en regardant sa montre. Il est 14h30. Nous sommes confiants.
Nous partons donc à l’assaut de la crête. Un passage étroit, non loin du vide, me fait craindre le pire. Mais non, après quelques mètres à peine, le sentier nous ramène en lieu sûr.
Les deux plans d’eau, qui en fait sont quatre, voire cinq, le cinquième étant caché.
Après avoir suivi la crête sur une centaine de mètres, le sentier longe un micro canyon et passe de l’autre côté, nous laissant découvrir Fernandeshitta.
Fernandeshitta : une cabane en rondin, solidement installée, attendant les randonneurs en quête d’un abri. Ce qui n’est pas notre cas aujourd’hui.
Après une courte halte, nous nous remettons en route alors qu’arrive un groupe de 3 randonneurs accompagnés de leur chien.
Le sentier reste à hauteur constante et nous mène au travers de blocs de rocher. Stefano décrit les lieux comme « le grand dérangement ».
Voici d’où nous venons et la crête que nous avons parcourue. Le refuge est quelque part, dans les rochers sur la gauche.
Devant nous, un champ de rochers, avec quelques passages un escarpés, rendus glissants par la neige. Néanmoins, rien de bien méchant, à condition de prendre le temps d’évaluer l’endroit où poser les pieds.
Nous rejoignons les pâturages.
Stefano en train de négocier une traversée neigeuse.
Moi, attendant sagement, ayant soigneusement mémorisé chaque endroit où il a posé ses pieds.
Nous laissons le sentier qui descend vers Feld et arrivons à un petit pont dont notre « topo » préféré se souviendra longtemps.
Bussalp est en bas. Nous avons 15 minutes pour y arriver, me dit Stefano. Si nous ne voulons attraper le bus de 16h35, sans attendre celui qui passe une heure plus tard.
Nous accélérons le pas. Encore 10 minutes. Nous voyons le bus arriver. Faire demi-tour. Nous arrivons sur le goudron et piquons un sprint. La conductrice nous regarde hilare. Il reste 3 minutes. Aujourd’hui, la boucle est parfaite. A quelques mètres près. Nous descendons du bus à Tuftbach. Il nous reste deux montées (et pas des moindres) pour arriver à la maison. Nous chantonnons sur un air de Bohemian Rapsody.
Itinéraire du jour
C’est ici et c’est chez Suisse Mobile.
Autoportraits du jour
Lors d’une de nos pauses de récupération, durant la montée au Faulhorn.
Sur le banc de la Reetihitta, à la pause pique-nique.
TSH at work.