Diamond beach. De son vrai nom Fjellsfjara. Même si plus authentique, ce nom est un peu moins vendeur. Cette plage de sable noir, entrecoupée par la rivière qui s’échappe du Jökulsárlón, est une pure merveille car constellée de centaines de blocs de glace, transparents pour certains, opaques ou bleus pour d’autres.
Nous aurions pu rester des heures sur le zodiac à écouter parler Julius. Si, au début, il nous avait semblé moins enthousiaste et plus taciturne qu’Eric, son acolyte, sa passion et ses connaissances nous ont captivés et tenus en haleine les 75 minutes qu’a duré l’excursion.
En enlevant nos combinaisons, nos cerveaux sont encore un peu brumeux, car activement occupés à assimiler toutes les informations reçues. Nous descendons du camion en titubant, un peu mélancoliques, comme à la sortie d’une salle de spectacle ou de cinéma, lorsque l’expérience a été extraordinaire. Avatar en 3D en fut une, le Cirque du Soleil et le Blue Man Group une autre. Notre virée en zodiac sur le Jökulsárlón en est assurément une troisième.
Nous retournons au bord du lac, là où il se rétrécit, avant de passer sous le pont et de se perdre en mer.
Quelques icebergs sont coincés par un décrochement de terrain et l’eau, furieuse d’être ainsi arrêtée dans sa course, cherche à les déloger.
Elle y parvient plutôt bien, la bougresse, car les diamants qui jonchent la plage de sable noir ne sont autres que des icebergs brisés rejetés à la mer et ramenés par la marée.
Celui-ci fait quelques carats.
Ah, s’il y avait eu un petit rayon de soleil !
Nous revenons vers le parking afin de traverser le pont et partir explorer la plage. Les icebergs échoués y semblent plus nombreux.
Nous regardons un long moment l’eau maltraitant un morceau de glace. Elle parvient à faire culbuter. Sitôt qu’il a perdu son équilibre, elle se faufile dans un trou et, sournoise, le fait pivoter. C’en est fini. L’agonie est de courte durée… Nous le voyons se briser et filer dans le courant.
De l’autre côté du pont, le parking est beaucoup plus calme. Sans les semi-remorques des tour operators l’activité y est moindre. Juste des voitures de touristes, comme nous, déchargeant et embarquant leurs heureux occupants.
La prospection de diamants est effectivement plus prometteuse ici. Ils sont plus volumineux, certains plus translucides, d’autres plus opaques et bleus.
Les icebergs flottants sont également plus nombreux, certains bons candidats à l’échouage si la mer se retire encore un peu.
Malgré une espérance de vie brève, les plus anciens, travaillés par le soleil, le vent et peut-être aussi les innombrables frôlements de vêtements, de mains, se distinguent par des particularités visuelles étonnantes. Sur celui-ci, l’eau a envahi ce qui pouvait être une bulle d’air, formant une gouille dans laquelle je glisse ma main à la recherche du fond. Fond qui doit se trouver 30 ou 40 cm au-dessous de ce que j’avais évalué. Ma main descend, descend, et je réalise mon erreur lorsque je sens l’eau remonter sous ma manche de doudoune. Trop tard !
La petite « goutte », à côté, ferait la joie d’un bijoutier, tant elle est délicate et raffinée, avec son petit cercle parfait de sable noir.
Le vent souffle, amenant humidité et froid. Si Luana n’a plus qu’une hâte, celle de rentrer au chaud dans la voiture, nous, Stefano et moi, avons l’esprit si occupé à traiter toutes les images qui s’offrent à nous que toutes sensations sont exclues.
Les icebergs les plus pittoresques attirent les foules. Mais la patience paie toujours. Même si, parfois, la fenêtre ne dure que quelques secondes.
Je réagis enfin aux grands signes que Luana s’évertue à me faire. Je me dirige vers elle. Regarde, me dit-elle, les yeux brillants, en pointant un bloc de glace d’une belle couleur bleue.
Petit zoom sur les bulles d’air emprisonnées dans la glace. Elles dessinent de jolies arabesques.
Nous souhaiterions retourner voir le Jökulsárlón mais depuis un autre angle. Luana grelotte. Nous la laissons donc dans la voiture, sous une bonne couverture de duvet et partons tout joyeux, mais quand même avec un petit regret de ne pas être à trois.
Autoportraits du lieu
Sur la plage de sable noir, aux éclats de diamants.
Pour être franche, j’ai eu un peu froid aux pieds quand même… Je n’aurai jamais dû patauger dans la mer car le vent, ensuite, ne m’a pas fait de cadeau…
Juste avant de nous réfugier dans la voiture. Trois petits Suisses heureux qui comme Ulisse…